
Les Canadiens ne doivent pas laisser les dernières difficultés changer leur nouveau style de jeu
31 décembre 2022
Daniel Vanier
Certains trouveront peut-être un peu drôle de voir ce texte alors que la troupe de Martin St-Louis n’a pas offert une grande performance récemment avec 4 défaites consécutives, dont une véritable raclée de 7-2 jeudi soir dernier contre les Panthers. Toutefois, malgré ces récents faux pas, force est d’admettre que les Canadiens de Montréal forment une belle surprise cette saison. Bien entendu, ils sont loin d’être une puissance de la LNH qui domine ses adversaires de la LNH. Ils sont présentement au 26e rang de la LNH en ce moment avec une fiche de 15-18-3 et au dernier rang de la Division Atlantique. Il n’y a rien pour pavoiser diront leurs plus ardents détracteurs…avec raison avouons-le. Ces 4 défaites d’affilée les ont fait bien entendu glisser de quelques rangs.
Cependant, plusieurs amateurs (dont l’auteur de ces lignes) croyaient que cette équipe en reconstruction allait faire encore pire. Depuis l’arrivée en poste de Jeff Gorton puis de celle de Kent Hughes, on sent que les Canadiens de Montréal sont littéralement en train de subir une transformation en profondeur. Une transformation complète qui risque fort de faire oublier toutes ces longues années de noirceur.
La fameuse déclaration de Mario Lemieux
Mario Lemieux fut un grand et prolifique joueur. Le marqueur de 1723 points en seulement 915 parties est bien placé pour connaître le jeu offensif et définir le style de jeu d’une équipe. Comme l’ancien numéro 66 des Penguins n’a jamais eu peur d’appeler un chat un chat, il n’a pas hésité à dire ce qu’il pensait du style de jeu qu’offraient les Canadiens de Montréal après une victoire de 4-1 par les Canadiens(alors dirigé par Claude Julien) contre son équipe le 11 décembre 2019. Pour lui, la formation montréalaise jouait du «hockey plate» et avait toujours joué ainsi:
Mario Lemieux feels the Canadiens played boring hockey to beat his Penguins last night. In fact, he feels that’s how they always do it, writes @Real_RobRossi: https://t.co/DWh8EyVLwv
— Arpon Basu (@ArponBasu) December 11, 2019
Lorsque «Le Magnifique » avait fait cette déclaration à Rob Rossi de The Athletic, il ne le faisait pas pour dénigrer la formation montréalaise, mais pour, en fait, les complimenter. Il faut savoir que, surtout à cette époque, dans le milieu de la LNH, le hockey plate était synonyme de discipline, de sacrifice au bénéfice du groupe. Il était donc en soi valorisé et l’ancien numéro 66 «avait presque l’air impressionné» comme le mentionnait Rob Rossi.
Ce style de jeu demande de la discipline et est souvent pratiqué par les équipes qui ne possèdent pas de grands joueurs offensifs. Ce qui était malheureusement le cas des Canadiens de Montréal depuis trop longtemps….avant cette année !
Une TROP longue liste d’entraîneurs défensifs et conservateurs
Depuis le départ de l’intransigeant (mais oh combien efficace!) Scotty Bowman, en 1979, les Canadiens de Montréal ont été dirigés par …20 entraîneurs ! Il ya a eu un court passage de l’ancienne vedette de l’équipe Bernard «Boum-Boum» Geoffrion, puis deux années avec Claude Ruel. Par la suite ce fut l’arrivée de Bob Berry et le jeu défensif fut mis sur la carte. Ce fut encore plus le cas avec l’arrivée de Jacques Lemaire qui a remplacé Berry en 1984. Autant, je fus un grand admirateur de Jacques Lemaire comme joueur, autant je l’ai détesté comme entraîneur. Lemaire fut un joueur inventif, intelligent et offensif. Comme entraîneur il fut aussi créatif en devenant l’inventeur de la trappe. Un système étouffant autant pour les joueurs et les amateurs de hockey, mais qui était très efficace. Ce qui a fait la renommée e Lemaire comme entraineur et bien que moi je déteste son style ultra-défensif, il est tout de même considéré comme un des meilleurs entraîneurs de tous les temps. C’est d’ailleurs pourquoi ce style fut copié par de nombreuses formations et a carrément failli tuer le hockey selon moi ou du moins l’a fait reculer pendant de nombreuses années alors que trop d’équipes offraient du hockey défensif ultra ennuyant à regarder. Ce style de jeu faisait baisser les cotes d’écoute et vidait de nombreux amphithéâtres. Lemaire a gagné une coupe par la suite avec les Devils en pratiquant cette fameuse trappe et c’est ce qui a propagé ce style de jeu moribond aux 4 coins de la ligue.
Trouvant trop difficile d’avoir à affronter la meute de journalistes suivant la formation montréalaise chaque jour et d’être constamment sous les feux de la rampe, Jacques Lemaire va offrir sa démission comme ntraîneur-chef et deviendra conseiller en 1986. Il fut remplacé par Jean Perron qui n’avait aucune expérience dans la LNH ni comme entraîneur, ni comme joueur. Les Canadiens étaient alors plutôt en fait mené par Larry Robinson et le capitaine Bob Gainey en coulisses. Les partisans du CH n’avaient pas encore du grand hockey offensif à se mettre sous la dent, mais ont eu droit à une belle équipe composée de moitié par des recrues qui ont tout donné et offert une Coupe Stanley aux montréalais. Ce fut ensuite le teigneux Pat Burns qui a pris la barre de l’équipe. L’ancien policier avait un style coloré comme personne, mais comme entraîneur il faisait pratiquer à sa formation un système ultra-défensif.Burns fut ensuite remplacé par Jacques Demers qui lui offrait enfin un style un peu plus axé sur l’attaque. Il faut dire cependant que le directeur général de l’époque, Serge Savard, lui avait fourni des munitions pour le faire avec les acquisitions de Vincent Damphousse et de Brian Bellows, durant la saison morte. Tout cela mis ensemble a donné au CH sa dernière coupe en 1992-93.
Demers fut congédié en 1995 et depuis, la valse des entraineurs au style ultra défensif se sont succédé. Les amateurs montréalaisont eu droit aux Mario Tremblay, Alain Vigneault (tout de même le moins pire de cette liste, Claude Julien (2 fois), Michel Therrien (2 fois) Bob Gainey, Jacques Mrtin(probablement le plus étouffant de cette liste) Randy Cunneyworth et Dominique Ducharme. J’avais hâte de voir Ducharme Remplacer Julien lors du 2e règne de celui-ci, car je croyais enfin voir un entraîneur au style offensif se pointer. Malheureusement, outre quelques ajouts ici et là, il ne faisait que mettre en pratique ce qu’il avait vu de Julien alors qu’il était son adjoint. De 1995 à 2022 nous avons donc eu droit à27 longues années de style défensif ennuyant à Montréal. Il y a eu une petite pause entre 2006 et 2009 avec le règne de Guy Carbonneau, qui était un peu moins pire que les autres de cette liste, mais encore là,on avait pas droit à du style ultra-offensif non plus.
C’est donc seulement avec l’arrivée en poste de Martin St-Louis en 2022 que le CH a enfin commencé à tranquillement changé son style de jeu.
Enfin du style offensif et excitant
En début de saison, nous avions droit à 2 équipes différentes avec les Canadiens. En effet, les hommes de Martin St-Louis offraient du jeu offensif devant ses partisans, mais a l’étranger les jeunes joueurs étaient visiblement plus nerveux et l’équipe jouait sur les talons en se repliant défensivement pour attendre de voir ce qu’allait faire l’adversaire et tenter de s’adapter. On jouait plus pour se défendre que pour attaquer et cela paraissait. Les résultats étaient donc moins bons à l’étranger. Puis les joueurs ont gagner quelque peu en confiance et ont offert du jeu plus offensif sur les patinoires étrangères. Ce qui était aussi beau à voir, c’est que les joueurs dirigés par Martin St-Louis ne baissent plus les bras comme auparavant lorsque la formation adverse prend une avance de quelques buts. Ils ne cessent d’attaquer avec hargne et sont vraiment intéressants à voir jouer. Évidemment, les victoires n’étaient pas si nombreuses, mais les Canadiens étaient excitants pour leurs partisans et luttaient même pour une participation en séries à un certain moment. On ne s’attendait tout de même pas à ce qu’ils allaient les faire et on savait que la réalité allait finir par les rattraper, car il ne faut pas oublier que nous avons en ce moment une formation en reconstruction, donc qui possède beaucoup de lacunes. Puis de nombreux joueurs importants se sont blessés et les défaites sont devenues plus fréquentes.
Ne pas laisser les difficultés changer le style de jeu
Ces blessures, combinées à un grand laxisme de certains vétérans qui jouent sans aucune hargne ont fait en sorte que ce beau début de saison qui offrait du jeu si divertissant malgré les défaites s’est gâté. Non seulement les défaites s’accumulent encore plus avec une minable fiche de huit défaites (2-7-1) lors des dix derniers matchs, mais les erreurs sont nombreuses et une disette offensive s’est installée. Le Tricolore a marqué plus de 2 buts 1 seule fois depuis 10 matchs. La dernière fois fut lors du gain de 3-2 contre les Coyotes de l’Arizona. De plus, les 2 gros canons de la formation, Nick Suzuki et Cole Caufield ont grandement ralenti après des débuts de saison impressionnants. 13 buts, 28 points après 26 matchs pour Suzuki, 16 buts, 25 points après 25 matchs pour Caufield. C’était excellent, mais c’est plus difficile ces derniers temps, car le jeune capitaine du Tricolore a inscrit seulement un but et deux points à ses 10 dernières parties. Son acolyte, Cole Caufield, a compté 3 buts (aucune passe) à ses neuf derniers matchs.
On savait que le CH et ses deux meneurs allaient connaître des périodes creuses. C’est maintenant qu’il va falloir faire preuve de caractère et rebondir. Toutefois, ce qui est un peu inquiétant est qu’on voit que certains joueurs, par fatigue ou par manque de confiance ne tentent plus d’orchestrer des jeux, mais vont se débarrasser de la rondelle plus rapidement ou la lancer au fond du territoire adverse. Il ne faudrait surtout pas laisser ces difficultés changer le style de jeu de l’équipe et revenir à un jeu défensif ennuyant.
Apprendre de ses erreurs
Dans son texte du 30 décembre dernier, « Les mauvaises habitudes se poursuivent… la glissade aussi», Le chroniqueur de RDS, François Gagnon, faisait état de nombreuses statistiques qui ne sont guère reluisantes pour le CH. En effet, au cours des 10 derniers matchs, le CH a tout simplement été horrible. L’équipe accorde beaucoup trop de tirs (Contre les Panthers, c’était la 9e fois lors des 10 dernières parties qu’il en accordait plus de 30) et n’en décoche pas assez. On les sent mêlés en ce moment. Ils doivent donc tenter de reprendre confiance et revenir à un style de jeu plus offensif. Oui, les jeunes joueurs du CH vont commettre des erreurs en jouant offensivement, mais ils vont aussi réussir à effectuer de plus en plus de jeux et s’améliorer. Cela fait partie du processus. Il faudra simplement apprendre de ces erreurs. L’organisation doit toutefois aussi apprendre de ses erreurs. Le jeu défensif peut être efficace pour inscrire quelques victoires à son tableau de chasse, mais ne doit pas demeurer l’ADN de l’équipe comme ce fut le cas au cours des 30 dernières années. Comme nous le mentionnons plus haut, c’est surtout efficace lorsque nous ne possédons pas suffisamment d’armes offensives. Toutefois, le CH peut aussi apprendre de ses erreurs et effectuer de bons choix au repêchage et bâtir une puissante machine offensive. Déjà, avec les Suziki, Caufield, Slafkovský, Dach et les Guhle, Xhekaj et Barron à la défensive c’est bien parti. D’autres jeunes talents offensifs comme les Owen Beck et Filip Mesar s’en viennent. Il ne faut donc surtout pas laisser les récents mauvais résultats influencer la nouvelle direction que semble vouloir prendre l’organisation des Canadiens de Montréal sous les ordres de Martin St-Louis. Continuons de joueur du hockey offensif, inspirant et surtout..Rafraichissant !
Les victoires vont finir par venir et surtout les partisans du CH vont ainsi bientôt pouvoir afficher leur plus beau sourire !
crédit photo :